Deux concepts et deux perspectives :

l’école à la maison vs l’école-maison

Quand on lit les documents des commissions scolaires ou du MELS relativement à l’enseignement à la maison, il y a un élément important qui ressort souvent, et qui laisse entrevoir clairement qu’ils perçoivent définitivement les enfants scolarisés à la maison comme faisant partie du système scolaire. Certes, la loi reconnaît aux commissions scolaires un droit de regard, par le moyen d’une évaluation quelconque, sur l’enseignement dispensé et l’expérience éducative vécue par les enfants enseignés à la maison; toutefois, il faut dire qu’il y a un monde entre d’une part, un enseignement dirigé par les parents et d’autre part, l’école… à la maison. Comment diffèrent-ils essentiellement?

L’école à la maison est un enseignement dispensé à la maison, et non à l’école, mais sous la supervision et le contrôle gouvernemental via les instances scolaires, qui sont, ici au Québec, les commissions scolaires. Le programme d’études, le contrôle de l’enseignement dispensé et de l’expérience éducative par un suivi quelconque, les modalités de l’évaluation et la sanction des études, sont ainsi déterminés par le gouvernement. Dans cette situation, les enfants enseignés à la maison ne sont qu’une extension du système scolaire et les instances scolaires sont justifiées de les considérer comme tels.

L’école-maison est un enseignement dispensé à la maison sous la supervision et le contrôle des parents. Les familles ont ici le choix du programme d’études et de la manière dont elles vont le gérer dans leur situation particulière. Dans ce cas, lorsqu’il y a une loi en vigueur sur le territoire, le contrôle exercé par les instances scolaires sur l’enseignement dispensé devrait s’opérer de la façon la moins contraignante possible pour les familles. Au Québec, en raison de l’article 15(4) de la Loi sur l’instruction publique, une évaluation en fin d’année est suffisante pour satisfaire aux exigences de la loi. Les parents-éducateurs devraient avoir aussi différentes options pour l’évaluation de leurs enfants, dont celle de fournir eux-mêmes une évaluation, selon différentes modalités. (Si vous avez des questions à ce sujet, n’hésitez pas à communiquer avec la HSLDA ou l’ACPEQ.) Dans la situation décrite brièvement dans ce paragraphe, les enfants scolarisés à la maison ne devraient pas être considérés comme faisant partie du système scolaire jusqu’au jour où ils l’intégreront.

Si les parents-éducateurspréfèrent faire évaluer leur enfant par la commission scolaire, c’est définitivement leur choix. Cependant, il est de loin préférable, pour conserver la plus grande latitude possible dans l’éducation de nos enfants et sauvegarder notre liberté, de fournir nous-mêmes une évaluation. Même si les administrateurs scolaires avec qui vous faites affaire sont très gentils et que les arrangements ne semblent pas trop contraignants pour l’instant, rien ne vous garantit qu’il en sera toujours ainsi, comme nous l’ont d’ailleurs déjà témoigné des parents-éducateurs qui avaient une « belle entente » avec leur commission scolaire. Les parents- éducateurs ont intérêt à garder une distance respectueuse avec leur commission scolaire en ce qui concerne toute offre de services (suivis, évaluations, etc.), dans le but de ne pas compromettre leurs libertés, et d’éviter de se retrouver éventuellement dans l’obligation de faire l’école… à la maison.

En outre, l’argent que recevront les commissions scolaires pour les enfants inscrits comme faisant l’école à la maison, justifiera leur prise en charge (suivis, évaluations, etc.) par ces mêmes commissions scolaires. D’après les informations que nous avons reçues, le montant qui aurait été accordé en juin dernier aux commissions scolaires, est d’environ 750$ par année par enfant scolarisé à la maison; si on le divise par le taux horaire d’environ 50$, on arrive à 15 heures de services éducatifs par enfant. Ceux qui voulaient un suivi dans leur projet d’école-maison seront ravis, mais cela ne se fera pas sans conséquences pour nos libertés à plus ou moins long terme. Cet argent octroyé aux commissions scolaires risque d’augmenter significativement le nombre de leurs interventions auprès de chaque enfant qui fait l’école-maison, et par le fait même, le nombre d’interactions entre les familles et les commissions scolaires. Les familles qui ont choisi l’école-maison risquent de finir par faire l’école… à la maison. Par contre, si les commissions scolaires ne dépensent pas cet argent et qu’on leur demande des comptes, le gouvernement ne pourra plus justifier de leur verser ces montants trop longtemps.

En conclusion, si les parents-éducateurs tiennent à leur liberté, il est dans leur intérêt de se tenir prêts à refuser les offres de service (suivis, évaluations, etc.) qui pourraient venir de la part des commissions scolaires, et à s’organiser en conséquence.